La solution aux problèmes du présent est à rechercher dans une sagesse venue du fond des âges. C’est ce que Jean-Loup Amselle constate autour de lui, du regain du tourisme mystique en quête d’enseignements oubliés des peuples de la forêt, à la naissance des “cultures du monde” dans le domaine artistique, en passant par la conception du musée Branly ou par la référence à la négritude dans le fameux discours de Dakar de Nicolas Sarkozy. Pour ce disciple de Georges Balandier, le phénomène est à mettre directement en face de l’effondrement des idéologies. Puisque les solutions pour se construire collectivement un avenir souhaitable n’existent plus, chacun se tourne individuellement vers le passé, avec l’espoir de parvenir à s’approprier la sagesse des Amérindiens ou des enseignements millénaires des bouddhistes tibétains. La “rétrovolution”, titre de son ouvrage (Stock), serait ainsi le nouvel opium du peuple, précipitant l’individu dans l’exotisme et l’illusion du paradis perdu en l’éloignant d’autant du travail de construction collective de l’avenir. C’est l’occasion pour cet anthropologue de dénoncer le courant d’opinion dominant, y compris chez ses collègues, qui fige les cultures exotiques en autant de logiciels écrits une fois pour toutes, perpétuant ainsi l’idée des traditions distinctes et opposées à la modernité. “J’ai toujours été plus attentif aux ressemblances plutôt qu’aux différences entre les êtres humains”, conclut cet africaniste chevronné.
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