En employant le mot minable Jean-Marc Ayrault pensait peut être au livre secret des samouraïs, Hagakure: « un samouraï qui oublie ses obligations envers les autres est un minable ». Les samouraïs vivent pour mourir, ce qui n’est pas le cas des entrepreneurs.
Un entrepreneur vit pour être libre d’entreprendre. L’argent devient un moyen ; avec de l’argent, les projets deviennent possibles, en tous les cas plus faciles. Pour le serial entrepreneur, individu incontrôlable, chaque projet intéressant se transforme en réalité. Le serial entrepreneur n’est intéressé ni par les médailles,ni par la reconnaissance républicaine, seulement par la possibilité de continuer à entreprendre goulument. Son dernier projet consistera, peut-être, à apporter l’argent gagné à une fondation (Warren Buffet, Bill Gates, Francois Pinault, Bernard Brnault), espérant ainsi conserver un peu de liberté à titre posthume.
Monsieur Ayraut et son gouvernement ne comprennent pas la culture de l’entrepreneur. Ils ignorent le risque et méprise l’argent trop vite gagné. Cette méconnaissance entraine un système fiscal qui va les faire fuir en imposant des prélèvements excessifs qui conduisent à les priver de leur capacité d’investir et donc de leur liberté d’ entreprendre. Même les sages dans l’Ancien Testament racontent que chaque homme doit donner, mais il ne faut pas donner trop en prenant le risque de tuer l’activité à l’origine des dons.
Partant du principe que tout homme triche et que ceux qui sont fortunes trichent encore plus, le gouvernement a demandé à son administration de multiplier les contrôles. Tous les dysfonctionnements sont autorisés.
L’entrepreneur se trouve donc cerné dans un système où :
- les lois fiscales conduisent à des prélèvements excessifs qui tuent la capacité d’entreprendre,
- l’administration fiscale fait un emploi abusif des règles existantes.
Pour se protéger, l’entrepreneur est obligé de partir, tout en restant en Europe ! L’entrepreneur n’est pas un samouraï, il n’est pas prêt à mourir.
- les règles françaises sont d’une part floues et d’autre part en décalage par rapport aux lois des autres pays européens.
Vous devriez, monsieur Ayrault méditer cette phrase de Montesquieu: « Une chose n’est pas juste parce qu’elle est loi, elle est loi parce qu’elle est juste »-------
Franck Ullmann est entrepreneur et membre du conseil d'administration de Marianne.
18 décembre 2012
Minable
Adam Lanza, encore un tueur de masse sans page Facebook
Après Breivik, Merah et Holmes, l'auteur de la tuerie de Newton Adam Lanza perpétue la caractéristique des tueurs de masse de l'époque récente, de ne pas avoir de page Facebook. Plus qu'une coïncidence, cela devient une règle, qui ne doit pas faire peser le soupçon sur ceux qui refusent de s'inscrire au réseau social.
Force est de reconnaître que cela devient plus qu'une coïncidence. Après l'auteur de la tuerie de Norvège Anders Behring Breivik, après l'auteur de la tuerie de Toulouse Mohammed Mehah, après l'auteur de la tuerie du cinéma d'Aurora James Holmes, voici qu'Adam Lanza partage lui aussi le même trait commun. Comme ces derniers, l'auteur de la tuerie de Newton semble avoir parmi ses caractéristiques de ne pas être inscrit sur Facebook alors qu'il est à un âge, 20 ans, où plus des trois quarts des Américains sont inscrits sur le premier réseau social du monde.
Après le massacre commis par James Holmes lors de l'avant-première de Batman, aux Etats-Unis, la presse allemande avait déjà remarqué ce trait spécifique chez une série d'auteurs de crimes massifs. Aucun d'entre eux n'étaient inscrits sur Facebook, alors que selon une chercheuse interrogée à l'époque, "les données suggèrent que 95 à 98 % des gens de l'âge de Holmes sont sur les médias sociaux".
Forcément, le fait qu'Adam Lanza lui non plus n'était pas inscrit sur le réseau social va renforcer l'idée (évidemment stupide) de devenir suspect si l'on a pas de page Facebook, même s'il existe de très nombreuses raisons de ne pas vouloir s'inscrire sur Facebook. A commencer par la protection de sa vie privée.
Car aujourd'hui, ne pas avoir de compte Facebook est vu comme un symptôme de non-intégration sociale, qui peut elle-même provoquer les pulsions meurtrières. Breivik, Holmes et Merah n'avaient jamais eu beaucoup d'amis "dans la vraie vie", et n'ont pas ressenti le besoin, l'envie ou la nécessité de s'inscrire sur un site Internet comme Facebook où tout est organisé autour des amis qu'ils n'ont pas. C'est la même chose pour Adam Lanza, qui est décrit comme un un adolescent "légèrement autiste", très intelligent mais "souvent tout seul", qui n'avait pas ou très peu d'amis.
"Les tueurs de masse sont souvent des gens individualistes, repliés sur eux-mêmes, introvertis, qui sont souvent en échec relationnel, en échec social, et qui parallèlement ont des traits paranoïaques", expliquait sur iTélé le psychiatre et criminologue Roland Coutanceau. "Ils ressentent les autres comme rejetant, ils se sentent mal aimés, mal compris, d'où au fond la naissance de cette rage destructrice qui va soutenir ce passage à l'acte hors normes".
Adam Lanza, un être étrange sans page Facebook | Rue89
A propos de la tuerie de Newton et de son auteur présumé, c’est peut-être la plus belle phrase du week-end :
« Socialement, Adam Lanza était un être étrange : à l’inverse de la plupart des jeunes de sa génération, il n’avait apparemment pas de compte Facebook. »
Lisez-la, relisez-la, retournez la en bouche. Admirez-en les restrictions apparentes, ce « la plupart », ce « apparemment ». On sent que l’auteur (journaliste au site de L’Express) ne parvient pas tout à fait à y croire. On sent qu’il brûlerait de poursuivre l’enquête, de partir chercher les traces, dans la vie réelle, de cet être étrange qui a si peu imprimé l’univers numérique.
Que dit cette phrase ? D’abord, banalement, le dépit mécanique des journalistes, qui ont pris l’habitude, en tout premier réflexe, de chercher sur les réseaux sociaux des traces des tueurs de masse.
Comme le relevait Rue89, c’est avec une pointe de dépit que l’information était donnée par les confrères sur les radios, pendant tout le week-end. On interrogeait un psychiatre. On cherchait à comprendre. Pas de page Facebook ? Aujourd’hui ? C’est forcément grave, docteur !
Mais cette phrase, dans sa musicalité, va au-delà de la banalité journalistique. Elle pourrait être l’incipit du grand roman du début du XXIe siècle, si Huxley, Marcel Aymé et Houellebecq avaient tenu la plume ensemble. Même sur les photos de classe, aucune trace : il était « camera shy » (timide devant les caméras).
A-t-on idée, Adam Lanza ! Et Breivik ? Vous n’auriez pas pu prendre exemple sur Breivik ? Haro sur le tueur de vingt ans qui, en sus de tous ses forfaits, a le culot de ne même pas laisser ses photos sur Facebook pour nourrir l’iconographie des télés.