Depuis le début des années 1990, la « mondialisation » désigne une nouvelle phase dans l’intégration planétaire des phénomènes économiques, financiers, écologiques et culturels. Un examen attentif montre que ce phénomène n’est ni linéaire ni irréversible.
« Avant, les évènements qui se déroulaient dans le monde n’étaient pas liés entre eux. Depuis, ils sont tous dépendants les uns des autres. » La constatation est banale, hormis le fait que celui qui la formule, Polybe, vivait au IIe siècle avant J.-C. ! La mondialisation, cette création d’un espace mondial interdépendant, n’est donc pas nouvelle. Certains la font même remonter à la diffusion de l’espèce humaine sur la planète…
Dès l’Empire romain, une première mondialisation s’est organisée autour de la Méditerranée. Mais il faut attendre les grandes découvertes, au XVe siècle, pour assurer la connexion entre les différentes sociétés de la Terre et la mise en place de cette « économie-monde » décrite par l’historien Fernand Braudel (1). Une mondialisation centrée sur l’Atlantique culmine au XIXe siècle : entre 1870 et 1914 naît un espace mondial des échanges comparable dans son ampleur à la séquence actuelle. Ouverture de nouvelles routes maritimes, avec le percement des canaux de Suez et de Panama, doublement de la flotte marchande mondiale et extension du chemin de fer, multiplication par 6 des échanges, déversement dans le monde de 50 millions d’Européens, qui peuplent de nouvelles terres et annexent d’immenses empires coloniaux…, la naissance de la mondialisation telle que nous la connaissons aujourd’hui a commencé il y a un siècle et demi.
Mais le processus n’est pas linéaire : la Première Guerre mondiale puis la grande dépression des années 1930 suscitent la montée des nationalismes étatiques, une fragmentation des marchés, le grand retour du protectionnisme. La mondialisation n’est plus à l’ordre du jour jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. La guerre froide et la constitution des blocs figent ensuite le monde pendant près d’un demi-siècle. Pourtant, la mondialisation actuelle est déjà en train de se mettre en place. Jacques Adda la définit comme « l’abolition de l’espace mondial sous l’emprise d’une généralisation du capitalisme, avec le démantèlement des frontières physiques et réglementaires (2) ». Selon l’OCDE, elle recouvre trois étapes :
• L’internationalisation, c'est-à-dire le développement des flux d’exportation ;
• La transnationalisation, qui est l’essor des flux d’investissement et des implantations à l’étranger ;
• La globalisation, avec la mise en place de réseaux mondiaux de production et d’information, notamment les NTIC (nouvelles technologies d’information et de communication).
La mondialisation actuelle, ce « processus géohistorique d’extension progressive du capitalisme à l’échelle planétaire », selon la formule de Laurent Carroué (3), est à la fois une idéologie – le libéralisme –, une monnaie – le dollar –, un outil – le capitalisme –, un système politique – la démocratie –, une langue – l’anglais.
A chaque phase de mondialisation, on retrouve les mêmes constantes : révolution des transports et des moyens de communication, rôle stratégique des innovations (les armes à feu au XVe siècle, la conteneurisation après la Seconde Guerre mondiale, Internet depuis les années 1990), rôle essentiel des Etats mais aussi des acteurs privés, depuis le capitalisme marchand de la bourgeoisie conquérante à la Renaissance jusqu’aux firmes transnationales et aux ONG aujourd’hui.
14 juin 2011
Qu'est-ce que la mondialisation ? - Sylvie Brunel, article Géographie
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire