L’Indigné est, à l’arrivée, un être triste et aigris
Les révoltés de Mai 68 voulaient l’avènement d’un monde nouveau et ils savaient lequel. Pour certains une démocratie prolétarienne avec des conseils ouvriers partout. Pour d’autres l’autogestion à la yougoslave (c’était la mode à l’époque). Et pour d’autres encore (quand même moins nombreux) le Grand Bond en avant, cher au président Mao. Ils ne connaissaient pas la haine, sauf peut-être à l’égard du communisme stalinien. Ils avaient lu Marx, Engels, Lénine, Trotsky, Rosa Luxembourg et aussi les situationnistes et aussi Reich et Herbert Marcuse. Ils témoignèrent dans leurs affiches, dans leurs slogans, dans leurs textes, d’un bouillonnement intellectuel exceptionnel. Ils échouèrent et, au vu de ce qu’on savait de l’URSS, et de ce qu’on a appris sur le Cambodge et la Chine, il vaut certainement mieux que les choses se soient passées ainsi.
Les Indignés maintenant. Ils lisent aussi : mais un seul livre, celui de Stéphane Hessel (22 pages, c’est court et c’est à leur portée, Edgard Morin qu’ils vénèrent c’est déjà trop long et compliqué). Ils ne rêvent pas, ne construisent pas, ne savent pas ce que c’est une utopie qui, même irréalisable, structure quand même les âmes et les cœurs. Non, ils sont juste contre. Dans un noir ressentiment théâtralisé où le cabotinage a le premier rôle. L’Indigné ne va pas à la sortie des usines pour soutenir des ouvriers licenciés. L’Indigné ne prendra pas chez lui, pour une heure, pour un soir, une famille de Roms afin de la nourrir. L’Indigné n’était pas présent au gymnase du 11 ème arrondissement où s’entassaient les migrants tunisiens. Mais l’Indigné s’indigne de ce qu’on fait aux ouvriers, aux Roms et aux Tunisiens.
08 juin 2011
Les Indignés français : posture et imposture | Atlantico
via atlantico.fr
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