L'être humain est capable du pire comme du meilleur. Des plus nobles élans de compassion comme des génocides les plus atroces. Où est sa vraie nature ? Deux circuits neuronaux viennent d'être identifiés dans le cerveau humain. L'un porte à la compassion, l'autre à l'indifférence devant la souffrance d'autrui.
Tout dépend du lien qui unit le sujet à la personne qui souffre. Dans les expériences menées par la neurologue Tania Singer et ses collègues de l'Université de Zurich, des supporters de football devaient observer un supporter de la même équipe, ou de l'équipe opposée, en train de recevoir une décharge électrique. Les supporters avaient la possibilité d'aider la personne souffrante en déviant une partie de la décharge sur eux-mêmes, ou bien de ne rien faire et, dans ce cas, ils pouvaient soit regarder ailleurs, soit observer la scène.
Cette expérience a montré que les supporters compatissaient avec une personne arborant les couleurs de la même équipe (et prenaient sur eux une partie de sa douleur physique), mais préféraient regarder souffrir une personne soutenant l'équipe opposée. Dans leur cerveau, des zones très différentes s'activaient : dans la situation de compassion, c'était une zone émotionnelle nommée insula antérieure ; dans la situation de cruauté, c'était le noyau accumbens, généralement impliqué dans les sensations de plaisir.
Voici sur quoi repose la théorie des endogroupes, selon laquelle l'être humain fait preuve d'altruisme envers les personnes affichant la même appartenance identitaire que lui, et d'hostilité vis-à-vis des membres de groupes externes. L'existence de structures cérébrales dédiées à ces changements d'attitude suggère que l'être humain est double vis-à-vis des thématiques altruistes. Il n'est ni bon ni mauvais, mais exprime ses tendances compassionnelles ou cruelles selon l'identité de la victime.
La zone de la cruauté (le noyau accumbens) est un générateur de plaisir, activé aussi bien par la nourriture que par l'alcool, les drogues ou le sexe. Sa mobilisation dans des situations de ce type laisse penser que la cruauté à l'égard des groupes externes est un comportement profondément ancré. Elle aurait rempli une fonction de survie illustrée par la théorie du « conflit réaliste », due au psychologue turc Muzafer Sherif dans les années 1960 : ce dernier avait observé que des individus normaux placés en situation de pénurie formaient rapidement des groupes antagonistes qui s'affrontaient pour l'accès aux ressources. La création de lignes de démarcation est une stratégie pour assurer sa propre survie.
La sélection naturelle aurait ainsi privilégié la capacité d'aider et celle de tuer. Comment, dans ce cas, expliquer l'existence de sentiments universels d'altruisme, non cantonnés à des groupes d'appartenance ? Non plus par la théorie de l'évolution, mais par l'influence des cultures. En ce sens, ce n'est pas l'homme qui est bon ou mauvais, mais les messages culturels qu'il produit collectivement et qui agissent en retour sur lui.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire