Comme les esprits s'échauffent ! Comme les paroles volent, péroraisons violentes de certains responsables, nonobstant bons connaisseurs du système de santé, qui se sont bien tus jusque-là ! Soyons lucides, la France n'a jamais trouvé le moyen de faire collaborer ses agences sanitaires avec l'efficacité et l'impartialité requises. La réponse du politique à une crise consiste chaque fois à créer une nouvelle structure censée surveiller les agissements des professionnels mis en cause et des organismes déjà existants.
On multiplie ainsi les lieux de décision, en découpant la réalité en petits tas isolés les uns des autres. Chaque agence, chaque autorité est composée de centaines voire de milliers de personnels, répartis dans des bureaux qui traitent à tour de rôle les dossiers en cherchant d'abord à se protéger. Conséquences : lenteur, parcellisation, jalousie des chefs et des sous-chefs, tout concourt à l'inefficacité, sous couvert d'un organigramme sanitaire étoffé sur le papier. Des centaines de millions d'euros sont injectés dans ces machines à retarder les décisions au prétexte de vérifications pusillanimes qui masquent l'inefficacité réelle du dispositif. Pourquoi refaire le monde, publier sans cesse des arrêtés, décrets et autres circulaires qui se contredisent parfois, alors que l'Europe a déjà réglé la question ? Nationalisme étroit générateur de redondance et de gabegie.
L'industrie du médicament est faite pour vendre des boîtes de pilules actives contre les maladies, est-ce un tort ? Parce qu'un laboratoire a lourdement failli, faut-il vouer aux gémonies toute la profession ? Souvenons-nous des millions d'individus qui bénéficient chaque jour des progrès de la science et des produits de santé mis sur le marché. Quand l'industrie du médicament aura quitté la France qu'aurons-nous gagné ? Une dépendance de plus et le sourire béat des pourfendeurs de l'économie capitaliste. La vraie question, mise sur la place publique par l'affaire du Mediator, concerne les rapports entre l'industrie et les différents acteurs de santé, médecins, experts, universités, associations de patients, syndicats et autres, jusqu'aux partis politiques. Pour limiter la dispersion et l'irresponsabilité, la concentration des structures est une impérieuse nécessité. Il y a urgence à regrouper en trois pôles : sécurité, prévention et pratique médicale, les multiples agences, instituts et autres autorités. Ainsi, le pôle sécurité réunirait l'Afssaps (produits de santé), l'Afssa (sécurité alimentaire) et l'Afesst (sécurité au travail) ; le pôle prévention regrouperait l'Institut national de veille sanitaire (INVS) et l'Institut national de la prévention (INPS) ; et le pôle pratiques médicales et profesionnelles de santé, la Haute Autorité de santé (HAS) et l'Institut national contre le cancer (Inca). Réduction des effectifs, abolition des postes créés uniquement pour bons services rendus et de ces doublons si chers à l'administration au prétexte de contrôler le voisin, accélération des circuits de décision, évaluation des résultats, tels sont les piliers d'une refonte de notre système de protection sanitaire qui traduirait un vrai changement dans l'organisation étatique.
La question des experts dits « indépendants » n'a aucun sens, car nul ne l'est vraiment. Les meilleurs scientifiques ou médecins dans un domaine sont sollicités par tous les organismes privés comme publics. Si l'expert indépendant n'est pas demandé, c'est parce que sa valeur ajoutée est nulle. L'essentiel consistera donc à dessiner de nouveaux circuits de décision qui empêchent la collusion, basés sur le contrat et son corollaire, la résiliation immédiate et sans appel en cas de conflit avéré. A ce prix seulement, nous retrouverons des institutions sanitaires dignes de leurs missions et en lesquelles nous ayons vraiment confiance.
25 janvier 2011
Mediator : ne pas inventer un remède pire que le mal
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